E nfin les revers arrivent. Après le débarquement du 6 juin 1944, le ciel est envahi par des vagues impressionnantes de bombardiers, de jour comme de nuit. SIEGEN fut bombardée de nombreuses fois et la ville fut pratiquement rasée.

Au début de l’année 1945, les wagons de ferraille et de coke n’arrivaient plus à l’usine suite à ces bombardements qui détruisaient aussi les voies ferrées. Le travail fut donc arrêté dans les deux usines, faute de matières premières.

Le kommando entier fut alors requis pour déblayer les rues de SIEGEN. Munis de pelles et de pioches, notre tâche ne fut pas facile. Quelquefois, il fallait dégager des victimes de ces amas de gravats.

Et un soir de janvier, je rentre au kommando frileux, avec de la température. Le lendemain, après une très mauvaise nuit, je m’inscris sur la liste des malades du jour. Le médecin allemand me fait un simple lavage d’oreille et m’exempte de travail.

Mon état s’aggrave très vite. Maurice, l’infirmier du kommando ne peut que me donner des cachets d’aspirine qui calment momentanément mes douleurs dans l’oreille gauche qui deviennent de plus en plus lancinantes au fil des jours. Mon oreille se met à suppurer abondamment. Le coton se remplit très vite et je le renouvelle de nombreuses fois dans la journée et durant la nuit. Impossible de me faire soigner à l’hôpital de SIEGEN qui a été touché par les bombardements et évacué de tout son personnel soignant.

Les mois de janvier et février se passent ainsi sans pouvoir rien faire et un matin de mars, je me découvre une grosse boule de pus derrière l’oreille. Le mal s’est extériorisé vers l’os temporal. C’est la mastoïdite qui nécessite une opération urgente.

Maintenant, le kommando est consigné dans les baraques. Plus de voyages à SIEGEN, toutes les voies de communication étant coupées. Nous sommes dans l’attente de l’arrivée des Américains que nous savons imminente. Nos gardiens, eux aussi, se tiennent prêts à partir. Ils sont soudain devenus très gentils avec nous. Ils vont d’ailleurs s’en aller, nous laissant libres.